Il n'y aura pas de sang versé

Maryline Desbiolles

Sabine Wespieser Éditeur

  • Conseillé par (Libraire)
    15 mars 2023

    Un roman percutant

    Printemps été 1869. Ateliers de soierie lyonnaise. Quatre ouvrières, du Piemont, de la Drôme, de Haute-Savoie, de Lyon. Quatre ovalistes, dont la tâche consiste à garnir les bobines des moulins ovales où l’on donne au fil grège la torsion nécessaire au tissage. Debout, 12 heures par jours, six Jours sur sept. Payées 1 ,40F. Logées – dans des dortoirs envahis de poussière de soie – nourries – de soupe claire. Toia – Rosalie – Marie – Clémence.

    A travers la vie ordinaire de ces quatre jeunes femmes, la condition ouvrière féminine du XIXème siècle est racontée comme une course non pas de fond mais de vitesse, comme l’impose la nécessité de survivre.
    Brève comme la vie d’ouvrières, après une longue ébullition de revendications, de rêves, d’espoir d’un peu de temps à soi - pour soi - pour apprendre par exemple à lire et à écrire. Et pour cela, quelques revendications somme toute pas extravagantes, si ?

    « (…) gagner d’avantage que 1,40 F, gagner 2 F comme les hommes même si c’est impensable, être payées au temps, pas aux pièces, et pas nourries logées comme des domestiques, avoir le droit de s’assoir, prendre plus de pauses, avoir une chambre à soi, ou du moins un lit à soi, travailler dix heures et non douze, avoir un lit et du temps à soi, c’est pas la lune, et c’est la lune à voir la tête des patrons auxquels ces doléances sont présentées le 17 juin 1869, de vive voix, bien sûr de vive voix, ces dames et demoiselles ne savent ni lire ni écrire, ou seulement quelques lettres, quelques mots, pas même leur nom le plus souvent (…) ».

    « Il n’y aura a pas de sang versé », certes mais il n’y aura pas de miracle non plus à l’issue de ce relai à quatre mains et quatre cœurs, parmi la multitude. L’écriture soutenue, haletante, chante une ritournelle du premier combat des femmes. - Estelle


  • Conseillé par (Libraire)
    22 avril 2023

    Lyon 1868, quatre jeunes femmes découvrent la ville où elles vivent et travaillent. Elles sont ovalistes et les ateliers de soieries deviennent leur quotidien, usant leurs yeux et leurs membres. La rage qui s'accumule dans leurs ventres est le point de départ de la première grève menée par des femmes. 1869 est historique, la course est lancée pour les droits des travailleur.euses lyonnais.es. Des questionnements toujours actuels et très inspirants.


  • Conseillé par
    7 mars 2023

    Un bel hommange

    J'ai terminé ce petit livre - conseillé par Jean Marc du Cadran Lunaire de Mâcon - hier soir veille de manifestation contre les retraites. En arpentant les rues de Lyon aujourd'hui j'ai repensé à ces femmes héroïnes de ce petit livre plein d'humanité et d'inhumanité. Ces femmes qui en 1861 ont aussi arpenté les rues de la Croix Rousse ou de la Guillotière pour un peu plus. Un peu plus de salaire - passer de 1,40 franc à 2 - un peu plus d'égalité - être traitées comme les hommes (déjà à cette époque et ce n'est toujours pas fini), un peu plus de qualité pour les logements (logées souvent au-dessus des machines, elles respiraient les poussières dangereuses jusqu'à la phtisie). Ces femmes exploitées ne sachant pour la plupart ni lire ni écrire mais qui ont décidé ensemble de manifester au péril de leur emploi et de leur vie.
    L'autrice nous propose une allégorie intéressante; la course en relais. Chaque femme fait partie de la course, chaque femme s'aide, chaque femme contribue à ce que le groupe gagne. Ces femmes de rien, ces femmes invisibles, ces femmes qui ne parlent des fois même pas la langue, ces femmes font cœur et peuvent s'élever vers une vie un peu meilleur. Juste un peu. On le sait, la route a été longue et l'est encore pour toutes les revendications des femmes.
    Ce petit livre est un bel hommage à ces femmes de rien qui pendant quelques semaines se sont levées. Il y en a eu d'autres après, beaucoup d'autres et il en faudra encore. Ces femmes de 1861 qui ne savaient pas lire ni écrire, ces femmes souvent enlevées de leur famille par des rabatteurs pour travailler dans des conditions terribles dans les soieries Lyonnaises, ces femmes-là se sont levées en bravant une autorité oppressante. Un bel exemple de courage.